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2009/06/06

Moi

John William Waterhouse - Miranda

Moi...Hadia




Je suis libanaise, née avec une plume entre mes doigts.Les bibliothèques étaient ma cour préférée.Les feuilles jaunies des livres portaient une odeur séduisante pour mes sens. Ma curiosité innée m'a poussé à fréquenter les chefs - d’œuvre, en arabe, français, et turque (langage de ma grand-mère morte avant ma naissance).Après une enfance gâtée, et romantique entre les bras d'une nature mythique, j'ai vieilli. J'ai vieilli la nuit même de mon mariage : cette nuit j'ai perdu mon enfance, ma liberté, et ma virginité. Ces trois choses dont je ne connaissais pas encore la valeur.Dès lors, j'ai trempé ma plume dans mon sang, pour écrire.L'écriture est mon seul compagnon fidèle.J'ai écrit pour sortir d'une situation tragique.L'écriture, les livres, et mes études: des préoccupations que j'ai exercé par amour, par talent inné. Il paraît que mon destin est lié, d'une manière mystérieuse, aux lettres.Je ne peux pas analyser cet attachement aux lettres, qu'importe la forme, la langue, la couleur, le fond: les lettres m'entourent, m'émeuvent, m'influencent, et parfois elles changent mon destin. Je crois à l'alchimie de mots, ce miracle qui change et influence notre destin.Mais, je crois que tout ce que j'ai écrit au passé, était par amour pour l'écriture elle-même; je n'ai jamais écrit ma vie intime qui n’existait pas. En fait, Je n'ai jamais aimé, sauf mes enfants et non pas l'homme qui était la cause de leur naissance. C'est bizarre, mais c'est la réalité. J'ai voulu des enfants, sans amour. J'ai aimé les lettres plus que les hommes; je n'ai pas pensé à aimer un homme qui a crée une œuvre ou une belle phrase; c'était sa créature qui m'intéressait. J’ai la passion de la création littéraire, parce que je suis née pour écrire. Mais, je crois que tout ce que j'ai écrit était artificiel, sans sentiments, sans âme.Le silence régnant, les yeux attachés à mon visage, et la dernière phrase de mon poème qui déclenchait les applaudissements, c'était la seule extase, le seul fantasme de ma vie.Pendant la guerre de 2006, le "moi" caché, oublié, anéanti, s’est réveillé; j'ai senti combien ma vie était, depuis 1967, une série des spectacles sanguins, horribles, mortels. Dans mes prunelles, sont gravés les photos de martyrs, les forêts de cercueils, et le chaos après l'explosion).La guerre a influencé radicalement la vie des libanais et leur futur. Les guerres attaquent les corps ainsi que les âmes.Maintenant, je suis en train de chercher mon "moi".Je suis la recherche de cette femme qui existe quelque part, dans mon âme, quelque part dans mon corps, et au-delà sur une lune inconnue ou un soleil mystique.Trop tard? Qu'importe? L'essentiel est de trouver la femme perdue dans les couloirs de la vie.Pour cela J'écris.









Dr. Hadia El Ayoubi-France